La Pertinence de l’Université Ouverte et d’Études à Distance
en Afrique

Kalemba Mwambazambi

VOL. 25, No. 1

Résumé

L'éducation, en tant que puissant levier de la création et du développement de la société, apparaît d’ores et déjà comme un processus permanent et adéquat de la socialisation de l’être humain. C’est sur cette notion d’éducation seulement que se greffe la formation. Si la formation universitaire à distance poursuit les mêmes objectifs que la formation résidentielle, sa spécificité apparaît comme un rayon de soleil. Étant également une formation en ligne, elle dépasse de loin le cadre physique des quatre murs d’une salle de classe traditionnelle, les limites administratives et les frontières géographiques. Les objectifs, faut-il les préciser, consistent à doter l’étudiant de connaissances adéquates, en appoint à la connaissance initiale. Vue sous cet angle, elle vise essentiellement l’amélioration de son niveau de compréhension, d’analyse, se préoccupe davantage de la résolution des différents problèmes quotidiens grâce à un esprit critique sans faille. Prend en compte la modification du comportement de la personne en situation de formation universitaire à distance laquelle modification est révélatrice de sa compétence d’où l’importance de cet article qui met en avant l’analyse et la démonstration de la pertinence de ce type de formation, en particulier en Afrique.

Abstract

Distance education transcends the physical boundaries of the four walls of a traditional classroom, as well as administrative limitations and geographic borders. Like traditional, face-to-face education, distance education facilitates knowledge development as well as the development of comprehension, analysis and evaluation skills. This article provides an analysis of distance education and its relevance to the needs of Africa.

Introduction

L’adéquation des systèmes éducatifs à l’heure de la mondialisation et plus particulièrement en Afrique reste la clé de voûte de tout développement socio-économique et culturo-politique du peuple, parce que les systèmes éducatifs en Afrique sont exposés aux différents problèmes aigus dus à l’absence d’efficacité, d’équité et d’efficience « aux arbitrages cruciaux de politique sectorielle compte tenu de l’intensité des contraintes socio-économiques » (Pongo 2008:27). Dans la dynamique actuelle des systèmes éducatifs considérés et pour lesquels la connaissance analytique est très insuffisante au moment où elle pourrait profondément éclairer différentes décisions socio-scolaires telles que le développement d’une scolarité primaire, secondaire et universitaire complète et de qualité en référence aux objectifs de la globalisation et de l’éducation pour tous. L’inclusion des populations africaines restent couramment exclues du système éducatif résidentiel. Il en est de même en ce qui concerne l’analyse des stratégies pour l’enseignement et la formation universitaire qui font suite à l’explosion démographique des jeunes diplômés d’État (Burundi, Cameroun, Centrafrique, Congo-Démocratique, Djibouti, Lesotho, Mozambique, Zimbabwe…) depuis plusieurs années, et qui restent sans possibilité d’entreprendre des études universitaires dans leurs localités respectives à cause de l’insuffisance des structures universitaires d’accueil et différents problèmes d’ordre financier, économique, social et culturel. Ainsi on observe, « la pression croissante exercée sur les gouvernements par les peuples voulant continuer les études universitaires ou postuniversitaires » (Pongo 2008:14). La pression et les enjeux économiques du marché sont au prorata de l’avancée de la technologie et de l’informatique, de l’évolution des exigences du marché du travail en matière de formation professionnelle continue et/ou de perfectionnement individuel de la nécessité économique de réduire les coûts de formation tout en répondant à certains nouveaux besoins du développement des nouvelles technologies de la communication et de l'information telles que l’Internet et le Web, comme le démontrent Ssemugabi et De Villiers (2007:906) : « avec des avances rapides en technologie de l'information et de communication, l'apprentissage sur Internet joue un rôle important dans la formation ». Pourtant la formation résidentielle inclut des séquences d'apprentissage dont les caractéristiques sont identiques à celles de la formation à distance telles que l'utilisation de didacticiels en autoformation, les devoirs à domicile, la préparation aux examens, etc. Cependant, ces différents facteurs déterminent les finalités que le monde reconnaît actuellement aux systèmes d'enseignement à distance, c’est-à-dire vaincre la distance géographique, répondre à des besoins socio-éducatifs, ajuster au mieux les paramètres de la mobilité professionnelle et de la qualification académique, responsabiliser l'apprentissage et baisser les coûts financiers par étudiant (Wessels 2000:34). Aussi s’ajoute le poids des contraintes économiques, du marché de l’emploi mais aussi du développement de la technologie et des enjeux économiques qui leur sont liés. C’est la formation universitaire ouverte et les études à distance, adaptées au besoin global, et la bonne formation d'une nouvelle génération d'hommes et de femmes capables d'être le levier de grands changements socio-économiques dont le monde en général et l’Afrique en particulier ont besoin pour sortir de leurs multiples crises et se recréer dans leur être, qui s’imposent actuellement. C’est la raison pour laquelle le temps actuel est prolifique pour de grandes innovations éducatives qui peuvent aider l’Afrique à se reconstruire sur une base solide, fondée sur un système éducatif cohérent et adapté au contexte de la globalisation.

De ce fait, la réorientation des systèmes éducatifs en Afrique pour promouvoir une formation utile à tous et une formation universitaire et postuniversitaire adaptée au contexte africain d’aujourd’hui s’avère nécessaire. Braimoh et Osiki (2008:50) affirment que « l'étude ouverte et à distance peut globalement élargir l'accessibilité à l'éducation pour la majorité des personnes, avec souplesse, de sorte que les processus d’étude et de gain puissent continuer côte à côte afin de promouvoir une formation supérieure de qualité pour tous ». Évidemment, l’organisation de différentes formations universitaires ouvertes et d’étude à distance peuvent aider beaucoup de citoyens et de citoyennes du monde à accéder à une formation de qualité dans plusieurs disciplines voulues sans engager beaucoup de finances, de déplacements sur de longues distances physiques, de budget de logement à l’étranger, de visa d’études et d’autres frais indispensables pour la survie en dehors de sa communauté d’origine. En dépit « des idéaux de l'éducation pour tous comme proposés par l'UNESCO 2000, les enjeux économiques des pays pauvres ne favorisent pas l’installation de la technologie de l’information et de communication dans les milieux ruraux » (Braimoh et Lekoko 2005:168). Cette « carence des structures de l’éducation et d’emploi dans les milieux ruraux a pour conséquence immédiate l’exode rural » (Pongo 2008:13).

Objectif

Cet article analyse et démontre la pertinence de la formation universitaire ouverte et d’études à distance afin de promouvoir un enseignement universitaire et postuniversitaire de qualité en Afrique, parce que ce continent présente actuellement beaucoup de lacunes en matière de formation.

Méthodologie de recherche

Cette réflexion est conduite selon la méthode dite descriptive, historico-analytique et comparative. Ainsi, les sources majeures utilisées pour décrire la pertinence de l’université ouverte et d’études à distance en Afrique sont les livres, les enquêtes sur le terrain et d’autres articles liés à cette réflexion.

Analyse et développement

La bonne formation universitaire d’une personne physique constitue un véritable accélérateur dans le processus de transformation sociale. Comme l’affirment Braimoh et Lephoto (2005:168), « l'éducation est une arme forte de changement social, un rocher du développement socio-économique national et un instrument efficace pour des états de changement, de la dépendance, d'oppression, d'ignorance et de perpétuelle victimisation ». C’est la raison pour laquelle le monde en général et l’Afrique en particulier ont besoin d’une réorganisation, d’une remobilisation et d’une redynamisation des différents systèmes éducatifs afin de rénover la science avec des outils conceptuels d’analyses, des critiques et du développement et dans le but de bien repenser la transformation positive de l’Afrique. Il faut repenser un système éducatif capable de vaincre les différentes faiblesses internes, les divisions ethnico-politiques, le VIH/Sida, la xénophobie et les différentes formes de violence, en vue de provoquer une véritable renaissance africaine, comme le soutient Maluleke (2000:19) dans son œuvre La redécouverte de la sagesse africaine. Sous l’empire de l’ignorance, de la déformation, de l’analphabétisme, de la xénophobie et des différentes formes de violence, l’Afrique demeure un continent de paradoxes et d’ambigüité tant académique que sociétale. Tels en sont les exemples de la République Démocratique du Congo, du Zimbabwe, de la Somalie et de l’Afrique du Sud. L’Afrique en général a un système éducatif très compliqué et parfois complexe. On trouve plusieurs pays qui ont leur vision éducative, parfois inadaptée aux réalités d’aujourd’hui.

L’éducation, qui constitue la clef de l’épanouissement de l’homme et du développement communautaire, est négligée dans une certaine mesure. De surcroît, la lutte sincère contre l’analphabétisme est presque inexistante, à telle enseigne que l’utilisation des nouvelles technologies d’enseignement et les nouveaux paradigmes psychopédagogiques sont inaccessibles dans plusieurs institutions d’enseignement. La mauvaise politique en matière éducative est à la base de tout ce gâchis. En outre, le problème d’une bonne formation dans des universités résidentielles se trouve aggravé par de nombreux autres facteurs tels que:

Toutes ces déconvenues conduisent les intellectuels africains à une prise de conscience de l’importance de lutter maintenant pour un avenir éducatif meilleur pour tous. Cette lutte consiste à motiver les responsables de la politique éducative à adapter leur politique d’enseignements aux besoins du moment et pousser également les leaders africains à repenser les systèmes éducatifs, permettant ainsi de promouvoir les études universitaires et postuniversitaires à distance qui sont, dans le contexte actuel, une nécessité absolue pour tous les étudiants à cause de leurs adaptations aux réalités socio-économico-politiques et leurs équipements technologico-scientifiques. En fait, l’enseignement à distance vient combler le vide institutionnel qui existait dans plusieurs pays africains tels l’Afrique du Sud, le Botswana, le Cameroun, le Ghana, le Lesotho, la Namibie, la Zambie et le Zimbabwe. Évidemment, les différents systèmes éducatifs sont fondamentalement faits pour produire un capital humain compétent et capable d’aider des nations à s’auto-transformer pour le bien-être de tous. De ce fait, les actions éducatives n’auront cette dimension, en effet, que dans la mesure où les universitaires formés réussiront à utiliser efficacement avec considération leurs compétences au cours de leur vie effective pour la transformation positive du monde et non pour la destruction du peuple. Historiquement, la formation à distance, qui est devenue un besoin pour le monde, est la fille aînée des cours par correspondance nés en Angleterre au siècle précédent sous l'action conjuguée de plusieurs innovations, entre autres, le développement du timbre-poste et d'un service postal fiable autant que régulier, et la production d'un papier offrant un bon rapport prix/qualité. À ses débuts, c’est-à-dire au milieu du dix-neuvième siècle, l’enseignement à distance ne connaissait donc pas d’autres formes que les cours par correspondance. Aussi les deux expressions ont-elles donc été longtemps considérées comme synonymes. Pour rétrospection, les historiens considèrent que l'enseignement par correspondance (aujourd’hui la formation à distance) a débuté « en 1840, à Londres, lors du lancement par Isaac Pitman des cours de sténographie par correspondance, sténographie dont il était par ailleurs l'inventeur, et le cours biblique par correspondance des Adventistes à Lubumbashi, République Démocratique du Congo » (Pongo 2008:5).

En effet, les cours par correspondance se sont rapidement développés dans le monde entier compte tenu de plusieurs problèmes socio-économico-politiques qui empêchaient les peuples à suivre une formation résidentielle et équilibrée. Mais la distance géographique et la croissance démographique présentent jusqu'à présent les principales causes qui ont favorisé l’avènement de la formation à distance depuis 1840 jusqu'à nos jours. De ce fait, l’expansion des cours par correspondance fait apparaître des structures de financement et de tutelle tant privées, publiques que semi-publiques. Cependant, l’initiative a été très vite partagée entre les deux secteurs public et privé. Dès l'origine de la formation à distance, les entrepreneurs privés y ont joué un rôle important, ce qui souligne le caractère rémunérateur de cette activité, tandis que les enjeux financiers et les pressions économiques vont progressivement se renforcer et peser de plus en plus lourdement dans le processus, comme en témoigne la tendance actuelle à la « marchandisation » de la formation. Ce phénomène est directement lié à l’introduction systématique de la formation à distance et des technologies de l’information et de la communication, Internet et Web, dans l’ensemble des systèmes éducatifs quels qu’en soit leurs niveaux. Pretorius (2001) ajoute « qu’il est clair que l'Internet en tant qu'élément du réseau de transmission devient des plus en plus global, populaire et des informations diverses deviennent de plus en plus disponibles. Cette augmentation de l'utilisation et de l'application de l'Internet a commencé à changer le visage du commerce, de l'enseignement, de l'éducation et de l'étude ». Aussi, certains considèrent les technologies de l’information et de communication comme un cheval de Troie, vecteur de la privatisation de la formation, etqui pensent qu’un refus de la formation ouverte et à distance et des technologies dans le contexte d’aujourd’hui constitue une forme de résistance à la globalisation, Braimoh (2002:243) écrit ceci:

L'apparition du système de l'éducation ouverte à tous et à distance est une évolution inévitable et phénoménale dans l'histoire des développements d'éducation internationalement. Même si le système résidentiel de l'éducation continue à être le courant principal de la transaction éducative, il y a des limites inhérentes en ce qui concerne l'expansion, l’accès, les capitaux propres et la rentabilité. La croissance des technologies de l'information et des communications a facilité l'expansion du mode de l’éducation à distance.

Le développement de la formation ouverte et à distance a coïncidé avec des mutations importantes des moyens de diffusion, de distribution et de circulation de l'information. Depuis ses débuts, la formation ouverte et à distance a connu un franc succès et un important développement dont l'ampleur est souvent ignorée en Afrique. Parallèlement à cette évolution, il y a lieu d’observer un déplacement de l'initiative en matière de formation ouverte et à distance qui demeure jusqu'au début du vingtième siècle l'apanage des institutions privées d'enseignement; les cours par correspondance en sont le meilleur exemple. Cependant, elle est progressivement passée entre les mains du secteur public. Là-dessus, Kaye et Henry (1985) affirment que « les initiatives gouvernementales sont aujourd'hui prépondérantes et les enjeux politiques de la formation à distance sont devenus importants ». Dans cet ordre d'idées, il est nécessaire de noter que la formation à distance s'est développée d'abord dans les pays ayant une forte tradition sociale et méritocratique: les pays scandinaves, la Grande Bretagne, Israël, l'Allemagne et l'Autriche. L’exemple de l’Open University anglaise qui est née d'une initiative politique d’Harold Wilson, « impressionné par l'utilisation faite aux USA et en URSS de la télévision à l'échelle régionale, motivé par le désir d'établir une plate-forme politique pour une révolution technologique et sociale » (GREP 1988:70) reste un exemple de poids. L’Open University anglaise, qui fait encore souvent office de référence en la matière, a été fondée en 1963 sous le nom de University of the Air. En Allemagne, en Hollande ou au Québec, la Fern Univesität, l’Open Universiteit et la Télé-Université du Québec (Téluq) sont nées dans le même contexte avec un mandat analogue. À la même époque, la chaîne de radio-télévision NKH au Japon crée une école secondaire, Bayerish Rundfunk qui organise le Tele-Kolleg qui touchera plusieurs dizaines de milliers d'élèves tandis qu'en France se mettent en place les radios propédeutiques universitaires. Un développement comparable s'observe dans les pays de l'Europe de l'Est, en Pologne, en Hongrie et en URSS.

Dans les années 70, un très grand nombre de pays développent des initiatives en matière d'enseignement à distance: le Brésil, le Costa Rica, l'Espagne, l'Iran, Israël, le Pakistan, le Venezuela et l’Afrique du Sud avec la University of South Africa. Ce développement de la formation à distance peut être mis en parallèle selon Levrat et Peraya (1999) « avec l'accroissement, au niveau mondial, entre 1960 et 1970, du nombre de jeunes qui recevaient de l'éducation: de 420 à 900 millions ». Van Niekerk (2004:185) soutient que « le mouvement de l'éducation par correspondance à l'étude ouverte et à distance a été une raison d'épistémologie changeante. La pratique de l'étude ouverte et à distance peut servir les besoins de plusieurs communautés ». Dans les pays industrialisés, la formation à distance contribue à la mutation industrielle et à la compétitivité des entreprises. Levrat et Peraya (1999) écrivent ceci: « La Communauté européenne joue actuellement un grand rôle dans le développement de la formation à distance au sein des États membres et aussi dans les pays d’Europe centrale et orientale ». En outre, cet enseignement à distance, de par sa modernité, est sensé utiliser et développer une technologie de pointe sans quoi ce sera une chute dans l’antiquité, c’est-à-dire dans le vieux système d’enseignement par correspondance auquel nous faisions allusion.

En effet, la formation à distance peut actuellement être l'occasion d'une clarification méthodologique essentielle dont l’institution universitaire résidentielle dans le monde en général et l’Afrique en particulier peut, dans ce sillage bienfaisant, être la première à bénéficier. Cependant, la rupture entre les actes d'enseignement et d'apprentissage, l'isolement de l'étudiant, la conception modulaire des unités d'enseignement, etc. nécessitent de la part de l'ensemble des personnes impliquées dans la formation – l'enseignant, le concepteur médiatique, le technologue de l'éducation, etc. – une explicitation exhaustive de la démarche pédagogique, ainsi fait valoir Pongo (2008:16), aux fins de:

Toutefois, la formation à distance est une formation parfois délocalisée et désynchronisée pour la simple raison que les enseignants ne peuvent pas se trouver ni au même lieu ni au même moment et c’est aussi la raison pour laquelle recourir à des dispositifs pédagogiques de communications médiatisées devient donc une pertinence effective pour certains milieux. Mais, les dispositifs les plus élémentaires intègrent souvent une importante dimension technologique et l'imprimé ne fait pas exception. À ce sujet Nipper (1989) déclare: « L’'imprimé qui marque le début de la formation à distance et constitue la base des cours par correspondance, est un principal vecteur d'enseignement et de tutorat ». Taylor et Swannel (1997) enchaînent : leTelelearning et la Flexible Learning Model sont également nécessaires pour assurer une meilleure formation à distance. Aussi, affirme Perriault (1996:44), « l’imprimé reste sans doute, le plus utilisé au niveau mondial ». Mais, du point de vue pédagogique, l’encadrement de l’étudiant par un tuteur disponible à tout moment est important dans ce système, parce que plus l’éloignement et l’isolement sont manifestes, plus l’étudiant ne peut être soutenu pédagogiquement. Par conséquent, il donnera difficilement le résultat escompté. Dans ce cas, Louw (2005) pense « qu’il est nécessaire pour des établissements d'éducation à distance de chercher le terrain d'entente de recherche parmi tous les participants qui sont impliqués dans le processus de développement de la formation afin de promouvoir ces participants et assurer des matériaux d'étude de qualité ».

En plus, les conditions classiques d'organisation de la formation à distance provoquent parfois chez l'étudiant l'impression subjective de solitude et la nécessité d'affronter sans aide chaque difficulté au moment où elle se présente. Les conséquences non négligeables de l'abandon de l’étudiant par le tuteur non disponible et très occupé avec autres choses sapent parfois la pertinence de l’enseignement à distance. Aussi, la diminution du temps de consultation entre l'étudiant et son tuteur, par exemple, peut provoquer la méfiance et la médiocrité qualitative des résultats de l’étude, surtout pour des études postuniversitaires. L’avantage majeur de l’outil informatique réside dans l’accès en tout temps aux exposés, mais l’absence de l’interaction humaine sur le champ de recherche est un inconvénient de ce système de formation surtout quand il s’agit de formation spéciale dans un champ d’étude tel que la chimie, la physique, la mathématique…, pour le savoir et le savoir-faire. De ce fait, la nécessité d'adapter les conditions de formation et l'organisation de celle-ci aux contextes académique, professionnel, personnel et familial de l’étudiant requiert plus de flexibilité et d'ouverture aux formations et à la gestion pédagogique de l’étudiant et son tuteur. C’est pour cette raison que la formation universitaire et postuniversitaire à distance peut progressivement accorder de l'importance à la coprésence des acteurs de la formation, mais en même temps à la nécessité de plus de flexibilité, de décentralisation administrative et de liberté des points de vue tant organisationnels que pédagogiques de tuteur. P Moore (1991:2-3), dont la théorie est connue sous le nom de « distance transactionnelle », pense que la « séparation entre tuteur et étudiant est avant tout un concept pédagogique dans la mesure où le dialogue médiatisé, dont la qualité est déterminée par la nature et les caractéristiques des médias utilisés, il devient évident qu’il reste le principal outil de médiation pédagogique ».

L’enseignement à distance reste conçu comme une opportunité offerte à l’étudiant dans la mesure où elle constitue l’occasion de développer un comportement plus autonome et plus responsable de l’étudiant. Toutefois, l’enseignement à distance reste et demeure une méthode de développement des connaissances, des habiletés et des attitudes, qui est rationalisée aussi bien par l’application des principes organisationnels de la division du travail que par l’utilisation extensive des moyens techniques, spécialement dans le but de produire du matériel éducatif de grande qualité qui rend possible l’instruction d’un grand nombre d’étudiants se trouvant au même moment sans contingence géographique. En d’autres termes, c’est une forme industrialisée d’enseignement et d’apprentissage. Cette industrialisation d’enseignement présente une pertinence à n’en plus douter dans le contexte de l’Afrique d’aujourd’hui qui malheureusement n’a pas assez de structures d’accueil et de grandes possibilités financières pour répondre positivement à une forte demande éducative de son peuple à l’échelon universitaire. Paradoxalement, Braimoh et Lephoto (2000:131) démontrent que « la majorité de la population du monde qui sont ignorants de l'opération et de la valeur de l’éducation à distance, généralement pensent que la formation à distance est subordonnée une fois comparée à celle des universités résidentielles ». Cependant, avec les progrès actuels des technologies d’information et de communication (TIC), par la puissance des ordinateurs améliorés, les taux de transfert plus rapide des données, la baisse des frais académiques et l’intégration effective de ces technologies dans les programmes de quelques universités d’études ouvertes et à distance telles que la University of South Africa et la Zimbabwe Open University, il y a des effets positifs sur les études ouvertes et à distances en Afrique (Harvey 2003). Malheureusement, le rapport de l’UNESCO (2007) estime « qu’en Afrique sub-saharienne, seulement 1 sur 250 personnes a accès à l'Internet par rapport à la moyenne mondiale ».

En outre, la plupart des institutions d’enseignements universitaires résidentielles dans cette sous-région sont actuellement dans un état de crise financière, d'effondrement des infrastructures et de fuite des cerveaux. C’est pourquoi, l’université ouverte et à distance peut être considérée comme l’une des meilleures solutions possibles aux différents problèmes d'accès à la formation de qualité en Afrique, surtout au Congo Démocratique, au Burundi et en Mozambique. Toutefois, la plupart des institutions universitaires au Botswana, au Cameroun, au Ghana, au Lesotho, au Sénégal, au Zimbabwe, en Afrique du Sud, en Namibie et en Zambie ont commencé à explorer la possibilité d'adopter ce mode d'enseignement à distance, afin de répondre positivement à la demande croissante de la population pour l'enseignement universitaire dans cette sous-région (Asunka 2008:2). De ce fait, grâce à une combinaison de diffusion vidéo synchrone, des matériaux en ligne, des cours imprimés, CD et DVD, ainsi que des sessions de chat synchrone, un réseau d'institutions universitaires africaines a été créé, en collaboration avec les universités de renommée internationale externes, afin de combler le vide institutionnel. Les exemples du programme zambien de la radio rurale qui contribue à la formation de plus de 21 000 agriculteurs ont développé de nouvelles compétences (ID21 de l'éducation 2002). Le cas de Grintek Telecom (Afrique du Sud) qui a développé un apprentissage interactif en communication et système de management (ICAM) pour le département de santé en Province de Free State est éloquent. Cette formation à distance rend possible l'interaction en direct entre professeurs et étudiants. La Zimbabwe Open University accueille déjà environ 10 000 étudiants. L’Université de Makerere en Ouganda a inscrit 1,400-2,000 étudiants en formation à distance pour l’obtention de Bachelor en Commerce, et planifie d’étendre des programmes de cours dans des domaines tels que le droit, la technologie et les sciences (Saint 1999:2). Madagascar a lancé l'utilisation des cassettes audio à partir des programmes universitaires en droit et en sciences sociales. Le Sénégal soutient la formation des enseignants et des programmes de maîtrise en santé et en droit. La Confédération des Open Learning Institutions en Afrique du Sud (COLISA), en partenariat avec ses trois principales universités (University of South Africa, Vudec et Vista University), a développé un Web-base système d'interaction entre étudiant et enseignant, ainsi qu'un programme d'accès local à Internet, gratuitement pour des étudiants qui ne disposent pas d'installations Internet chez eux. Les Universités « d'Abuja, de Maurice, du Ghana et d'Éthiopie travaillent en collaboration comme une université virtuelle africaine » (Pongo 2008:19). En Afrique du Sud, par exemple, 50% des étudiants de l'Université d'Afrique du Sud sont des femmes ayant des responsabilités du ménage. Toutefois, en Afrique sub-saharienne la promesse des TIC est énorme. Si les problèmes qui tapissent de longue date l’Afrique étaient surmontés, les communautés d'Afrique pourraient tirer profit des TIC, car « elles pourraient supprimer les barrières traditionnelles qui limitent l’enseignement universitaire aux apprenants » (Chisenga 2003:476). Cela signifie en pratique que les méthodes traditionnelles d'enseignement sont complétées et soutenues par les TIC, dans la mesure où certaines sections du programme peuvent être offertes sans la présence physique de l'enseignant (Chisenga 2003:477).

En fait, pour bien comprendre l'enseignement à distance en Afrique, il est pertinent de comparer les caractéristiques du marché occidental par rapport à la situation africaine, parce que l'Afrique est un continent très vaste, couvrant plus de 53 pays indépendants, avec une population estimée plus ou moins à 700 millions de personnes, et où plus de 50% ont moins de 30 ans (Saint 1999:3). Cependant, la demande pour une formation de qualité est énorme, car plus de 200 millions d'adultes sont analphabètes (33% de la population adulte), avec des chiffres bruts de scolarisation en Afrique sub-saharienne qui sont de l’ordre de 73,1% pour le niveau primaire et 23,1% pour l'école secondaire. Seulement 3,3% des jeunes de 18 à 25 ans font des études universitaires (Commonwealth of Learning 2000:43). L’éducation à distance n'est pas la solution ultime aux problèmes africains, mais avec l'aide des TIC on assistera à un plus grand impact sur la résolution de certains problèmes de l'enseignement supérieur et universitaire. Plus important encore, avec les TIC échéants, une plus forte démarche d'éducation à distance peut augmenter l’accès à l'éducation en atteignant les quatre groupes qui sont normalement exclus (Saint 1999:14-15).

Les universités ouvertes et d’études à distance sont nécessaires pour l’Afrique d’aujourd’hui, parce qu’elles l’aident à bien former ses cadres et ses futurs leaders. Mais ce moyen moderne de formation voulu par les Africains, moyen qui fait appel à la nouvelle technologie (Internet, Web, etc.), pose problème dans son utilisation car plusieurs zones d’Afrique, surtout dans le milieu rural, n’ont pas accès à l’ordinateur. Cependant, la distance temporelle qui stimule l’étudiant à assimiler les contenus des cours, à apprendre la matière, à faire les travaux et les exercices à son rythme personnel adapté à ses besoins, à ses capacités autant qu'à ses conditions d'existence, est utile dans le cadre de la formation à distance en Afrique. Cette distance temporelle qui est le temps de communication entre tuteur et étudiant, le temps d’échanger la correspondance avec l'institution aux fins de réponses du tuteur aux différentes préoccupations de l’étudiant, le temps que prend le retour de courrier pédagogique et administratif ou encore le délai nécessaire à la correction des devoirs peut être déterminé et respecté par les deux parties. De ce fait, mes analyses et évaluations démontrent que le taux d'abandon des études dans différentes institutions d’enseignement à distance dépend partiellement de ce facteur, parce que souvent les tuteurs non disponibles causent beaucoup de préjudices aux étudiants, entre autres le retard dans la correction des devoirs, des dissertations et des thèses de leurs étudiants. Ainsi, il est temps de motiver le droit à l’éducation et au développement tant personnel, académique que professionnel des Africains et de promouvoir la flexibilité des tuteurs. De ce fait, l’université ouverte et à distance est appelée à revoir ses structures administratives et académiques afin de promouvoir une formation de qualité et répondre favorablement aux attentes des étudiants, afin de lutter positivement contre toutes formes d’ignorance, d’obstacles psychologiques, géographiques, économiques, culturels et sociaux qui empêchent souvent la transformation positive de la société africaine. Aussi, préserver les individus de mauvaises appréhensions face à la formation à distance constitue également un des aspects essentiels de ce problème. Évidemment, pour promouvoir la formation ouverte et à distance en Afrique, il est nécessaire de mener des campagnes de vulgarisation de la teneur de l’enseignement reçu ainsi que de la qualité, de la performance des cadres ressortissants sur le marché du travail, de la valorisation des diplômes par les pouvoirs éducatifs et de la réduction notable du coût global des études. En effet, ce système éducatif est pertinent parce qu’il est accessible à tous et dans n’importe quel milieu géographique. Ainsi, la formation universitaire ouverte, à distance et résidentielle reste la clé pour le développement multidimensionnel de l’Afrique.

Conclusion

La barrière géographique ne fait plus obstacle à la formation ouverte et à distance. L’analyse de cet article réveille l’intérêt des acteurs du secteur de l’éducation avec la prise de conscience des décideurs politiques de pouvoir promouvoir la formation ouverte et à distance afin d’aligner l’Afrique dans la globalisation des compétences académiques de leurs élites. Nul n’est besoin de renchérir que la formation ouverte et à distance n’est en rien inférieure au système résidentiel d’enseignement. Par contre, l’étudiant à l’université ouverte est davantage exercé à la prise à cœur de la recherche scientifique, ce qui lui ouvre l’acquisition de plus en plus large des connaissances scientifiques, au moyen de l’outil technologique moderne de l’information et de la communication. En fait, la formation ouverte et à distance est, sans le moindre doute, la forme la mieux indiquée pour sa flexibilité en faveur des étudiants qui pensent améliorer leurs connaissances au profit de la communauté tout en rendant au même moment des services à la société dans leurs activités professionnelles respectives. L’université ouverte et d’étude à distance marque une fois de plus sa pertinence par le fait que les universités résidentielles ne peuvent pas satisfaire tous les demandeurs d’admissions en raison de leur capacité d’accueil, surtout que la demande d’inscription devient de plus en plus croissante. Cependant, l’université ouverte et à distance peut restructurer et redynamiser son appareil administratif pour éviter la livraison tardive des cours, des devoirs, des examens, des résultats, des corrigés de dissertations et de thèses, causée par la suractivité des tuteurs, des superviseurs/promoteurs et la lourdeur du circuit postal. L’Afrique à l’heure de la globalisation peut enfin revoir son système éducatif pour étendre la formation de qualité au plus grand nombre de membres de sa population. Aussi, les acteurs en charge de la politique socio-éducative peuvent adapter la politique salariale afin d’éviter la fuite des cerveaux. Là-dessus Braimoh (2000:131) écrit ceci: « Il est maintenant utile d’adopter un système flexible, constructif des approches multi-perspectives, pour nourrir la créativité, le leadership, l’érudition et le développement intégré de la personnalité humaine ». Cependant, il est à espérer que les acteurs actuels et futurs de l’éducation ouverte et à distance bénéficieront de l’analyse critique des diverses questions sur l’éducation à distance et lanceront un nouveau débat et des réflexions dans tous les domaines de la formation ouverte et à distance.

Références

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Kalemba Mwambazambi est Professeur a l’Université de l’Afrique du Sud (UNISA) et Chef du Département de Missiologie à la Faculté de Théologie Evangélique de Bangui «FATEB». E-mail: revclokalemba2@yahoo.fr